Une nouvelle campagne pour sortir du silence!

6 décembre 2023

#BalanceTonProprio, une nouvelle campagne a fait son apparition ce 5 décembre dans l’espace public bruxellois et sur les réseaux sociaux. Des locataires dénoncent leurs conditions de logement et les agissements de leur propriétaire. Des centaines d’affiches avec des témoignages ont été affichées.

Le communiqué de presse annonçant la campagne est reproduit en entier ci-dessous.

COMMUNIQUE DE PRESSE

Bruxelles, le 5 décembre 2023

#BalanceTonProprio, une nouvelle campagne a fait son apparition dans l’espace public et sur les réseaux sociaux. Des locataires dénoncent leurs conditions de logement et les agissements de leur propriétaire.

Ces dernières semaines, le Syndicat National des Propriétaires et Copropriétaires (SNPC) est intervenu dans les médias pour relancer cette vieille revendication des syndicats de propriétaires-bailleurs qu'est l'établissement d'une liste noire des « mauvais locataires », ceux qui auraient des arriérés de loyer ou qui auraient dégradé le logement qu'ils occupent. Ce syndicat avait déjà dressé une telle liste par le passé, permettant ainsi à leurs affiliés de stigmatiser leurs locataires sur simple déclaration. Avec la campagne #BalanceTonProprio, les locataires souhaitent apporter la contradiction aux discours idéologiques du SNPC et de nombreux bailleurs.

BalanceTonProprio entend renverser ce rapport de force en dénonçant, à son tour, les pratiques de certains bailleurs.

Si un locataire dit « défaillant » est presque systématiquement exposé à une condamnation à payer les arriérés de loyer et à une possible perte de logement, il est beaucoup plus rare de voir un bailleur sanctionné ou inquiété pour ses manquements.

Le locataire dispose en effet de peu de moyens de pression pour contraindre son propriétaire à se conformer à ses obligations. Pire encore, tenter de faire valoir ses droits pourrait se retourner contre lui. Dénoncer par exemple l'insalubrité de son logement revient bien souvent à devoir le quitter. #BalanceTonProprio entend renverser ce rapport de force en dénonçant, à son tour, les pratiques de certains bailleurs.

De fait, les agissements ou les négligences des bailleurs qui mettent pourtant en danger la santé et la sécurité de leurs locataires sont rarement dénoncés auprès des instances judiciaires. Et lorsqu'ils le sont, les marchands de sommeil contre lesquels les pouvoirs publics affirment vouloir lutter sont rarement poursuivis. En cela, l'audience qui se tiendra prochainement concernant des logements insalubres rue des Côteaux fait plutôt figure d'exception1.

Par contre, on compte environ 11 expulsions judiciaires prononcées par jour à Bruxelles, soit plus de 4000 ménages par an qui se voient privés de leur logement2. Ce chiffre ne comprend pas les expulsions pratiquées en dehors de tout cadre légal par certains propriétaires : changement de serrure pour que le locataire ne puisse plus entrer dans son domicile, usage d'intimidations, de la force, ... 

BalanceTonProprio appelle tous les locataires, victimes de grandes ou petites injustices, à témoigner ou dénoncer les propriétaires abusifs. Rendez-vous sur les réseaux.

Alors que le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine est inscrit dans la loi, ce qui passe indéniablement par l'accès à un logement décent, ce sont donc les propriétaires qui in fine disposent d'un pouvoir disproportionné en décidant de qui peut rester chez soi ou non, et sous quelles conditions. Ils invoquent pour cela la sacro-sainte propriété privée avec bien souvent la bénédiction des instances judiciaires. Il suffit de lire la déclaration de la conférence des Juges de paix de Bruxelles sur l'instauration de la trêve hivernale pour se rendre compte que le parti pris de certains d'entre eux n'est pas une vue de l'esprit3.

Pourtant, les conséquences du mal-logement ou d’une expulsion sont infiniment plus graves pour les locataires. Rappelons que dans une grande majorité de cas, le loyer constitue une rente « bonus » pour celui qui la perçoit et non un réel moyen de subsistance. Il est pourtant le premier poste de dépense pour bien des locataires qui y consacrent la plus grande partie de leurs revenus. 

Alors que la moitié des jugements d'expulsions sont motivés par des impayés de loyers de moins de 3000 euros, les locataires expulsés risquent eux d'absolument tout perdre. Ceux qui peinent à payer leur loyer (trop cher) doivent faire des concessions sur d'autres postes essentiels à leur santé et leur bien-être. Ceux qui vivent dans l'insalubrité se voient contraints de payer par leur santé (physique, mentale et sociale) de peur de ne pas trouver de logement plus adapté. Des solutions de relogement sont en réalité rarement proposées et l’impossibilité de trouver un logement abordable sur le marché privé oblige les locataires à accepter des conditions indignes. Des vies sont ainsi marquées. Il est temps de sortir du silence.

Le droit au logement abordable, digne et décent doit primer sur celui de la propriété privée. Des solutions concrètes peuvent être mises en place pour lutter tant contre les expulsions que le mal logement. Il faut notamment stopper cette hausse aussi délirante qu'injustifiée des loyers à Bruxelles. Plutôt que tenter de stigmatiser des locataires qui ont du mal à faire face à des loyers devenus impayables, il est temps que les bailleurs voient leur gourmandise modérée par une mesure d'encadrement des loyers et de normes de salubrité à respecter.

Le logement digne et abordable est un droit fondamental, pas une marchandise!

#BalanceTonProprio appelle tous les locataires, victimes de grandes ou petites injustices, à témoigner ou dénoncer les propriétaires abusifs. Rendez-vous sur les réseaux.

1 Pour plus d'infos, voir articles de presse : https://www.dhnet.be/regions/bruxelles/2022/04/29/schaerbeek-un-marchand-de-sommeil-casse-tout-pour-expulser-ses-locataires-M5NEYXHC5NFCTFLETFBHPA2IFQ/ et https://medor.coop/magazines/medor-n30-hiver-2023-2024/moi-said-48-ans-marchand-de-sommeil-immobilier-logement-exploitation-insalubrite-precarite-stupefiants-justice/?full=1

2 Voir étude Pernelle Godart, Eva Swyngedouw, Mathieu Van Criekingen et Bas van Heur, « Les expulsions de logement à Bruxelles : combien, qui et où ? », Brussels Studies [En ligne], Collection générale, n° 176, mis en ligne le 12 février 2023, consulté le 03 décembre 2023. URL : http://journals.openedition.org/brussels/6434 ; DOI : https://doi.org/10.4000/brussels.6434

3 https://urjpp.be/assets/media//kvvp/20230613-avis-advies-uithuiszetting-expulsion-def.pdf